Réflexions personnelles sur notre système éducatif et son actualité

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Albert Jacquard et l’école

In Tableau d'honneur on 12 septembre 2013 at 13 h 51 min

Pour lui rendre Hommage, quelques citations d’Albert Jacquard sur l’école

Le système éducatif a pour fonction de provoquer chez chaque humain la métamorphose de l’objet qu’est le petit d’homme, poussière d’étoile parmi d’autres poussières d’étoile, en un sujet qui devient lui même grâce à son insertion dans la communauté humaine.

Le système éducatif peut être défini comme le lieu où l’on enseigne et où l’on pratique l’art de la rencontre.

Il faut l’affirmer en toute occasion : la fonction du système éducatif n’est pas de fournir à ce Moloch qu’est le système économique les femmes et les hommes compétents dont il prétend avoir besoin. Son objectif est de participer à une tâche autrement décisive : aider chacun à devenir lui-même en rencontrant les autres.

Il est utile de repérer les attitudes qui, sournoisement, nous enferment dans des schémas préfabriqués. le goût pour la notation chiffrée et pour les palmarès est sans doute parmi les plus pernicieux.

Une note est un nombre et les nombres ont été inventés pour mesurer. Que peut donc bien mesurer le 18 ou le 2 attribués à une copie ? Aucune répons en(‘est possible. Le correcteur est donc pris en flagrant délit de déraison ou, pie encore, de mystification. Il prétend réponde à une question sur la « valeur » de la copie, il répond en fait à une autre, implicite et peut-être inconsciente. Il répond très probablement à : « Quelle est la place de cette copie dans la hiérarchie de celles réelles ou virtuelles, que j’ai à corriger ? »

La justification principale mais non avouée de la notation chiffrée, celle qui explique le recours généralisé à un nombre pour exprimer une opinion, est qu’elle permet d’établir un palmarès. Or, l’éducation n’a nul besoin de palmarès. A quo peut bien servir le constat que l’élève X est « meilleur » que l’élève Y ?

Il est facile d’apprendre, et cela est le plus souvent suffisant pour répondre aux questions posées ou pour prendre les décisions quotidiennes, mais s’en satisfaire, c’est accepter de se nourrir des miettes qui tombent de la table du banquet […] Comprendre nécessite un effort parfois long et rebutant, mais cet effort permet de réellement goûter aux plats et de se réjouir de saveurs nouvelles.

Dans noter société où la vitesse est une valeur, la tentation de l’école est d’apporter du savoir sans trop se préoccuper de la compréhension. C’est se contenter d’un plat surgelé qui a perdu sa finesse et surtout qui n’aiguise pas l’appétit.

Faut-il organiser des classes homogènes, les « bons » avec les « bons », les « en retard » entre eux, ou préférer le mélange des performances ? Dans notre société avide de réussite et de vitesse, c’est la première proposition qui risque d’être retenue ; elle est pourtant mauvaise pour tous. Elle prive chacun de la richesse qu’aurait pu lui apporter le contact avec un camarade « différent ». Cela est vrai même lorsque cette différence est cataloguée comme constituant un « handicap ».
Hélas, les parents d’élèves et les enseignants sont tentés d’évoquer le retard que cette présence provoquera et d’insister pour la mise à l’écart des élèves qui ne « suivent » pas. Pourtant, dans le processus de la compréhension, le dialogue entre celui « qui sait qu’il n’a pas encore compris » et celui « qui croit, souvent à tort, avoir déjà compris », est une étape utile pour tous. C’est à plusieurs que la compréhension progresse. Dans l’immédiat, l’homogénéité d’une classe gomme bien des problèmes, elle est plus confortable pour tous, mais c’est justement la recherche collective des solutions à ces problèmes qui aurait été bénéfique. Cette recherche est une occasion d’exercer la mise en commun, de mettre en évidence la fécondité de la recherche solidaire face aux limites de l’exploit solitaire.

Mettre en place un enseignement fondé sur la solidarité et non la compétition n’est pas un rêve d’utopiste ; il est en cours de réalisation dans l’Etat en tête de l’Europe pour le PNB par habitant, le Luxembourg.

Il était aussi l’auteur de ce fameux texte « Moi, Albert Jacquard, ministre de l’Éducation, je décrète »

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