Réflexions personnelles sur notre système éducatif et son actualité

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L’aide dans les pédagogies coopératives : du dénigrement gratuit à la réalité des pratiques

In Salle des profs on 10 août 2020 at 15 h 32 min

Illustration de ce que la méconnaissance associée à la mauvaise foi et à la malveillance peut donner comme « débat » sur les pratiques pédagogiques.

Ici, on en vient à extraire un élément d’un outil pour tirer les conclusions qu’on a envie d’en tirer pour dénigrer. La pédagogie, c’est précisément faire dialoguer les outils, les pratiques avec un système de valeurs et des éléments scientifiques, théoriques qui permettent d’éviter certains écueils. Un outil isolé ne dit pas grand chose de la réalité pédagogique. Un plan de travail peut très bien être utilisé dans une approche uniquement behavioriste, mécanique et individualiste des apprentissages. Dans les pédagogies coopératives, il est non seulement associé à de l’aide (comme ici), du tutorat et il ne concerne que certains temps d’apprentissage, en particulier pour travailler les automatismes (que les mêmes détracteurs voudraient faire croire qu’ils sont négligés dans ces pédagogies). Il est donc aussi largement compléter par des moments de travaux en groupes mais aussi de temps de leçons…

Finalement, ici, on ne commente pas les pratiques des collègues mais ce qu’on en invente et qu’on finit par y croire soi-même.

On déduit par exemple de la présence de cette rubrique sur un plan de travail que la coopération est obligatoire. Il suffirait d’échanger un minimum avec les collègues pour savoir que cette rubrique n’est renseignée par l’élève que si il y a eu aide. L’aide étant par définition informelle, elle n’a pas de caractère obligatoire.

Le plan de travail c’est au contraire la pédagogie des choix : choix de certaines activités d’apprentissages, choix de l’ordre de ces activités mais aussi choix des modalités de travail (notamment de travailler seul quand la tâche ne nécessite pas d’interactions ou qu’elles ne sont pas souhaitées).

La coopération proposée serait donc également excluante et malveillante ? Là encore, connaître la réalité des pratiques mais aussi les recherches qui existent depuis longtemps sur le sujet et non les caricatures qu’on en invente soi-même suffirait à éviter d’écrire des  raccourcis qui servent de biais de confirmation.

Si l’aide peut présenter des risques, elle est aussi un fort levier pour éviter que des élèves fragiles soient sans solution et donc, de fait, mis à l’écart des apprentissages. Le risque d’exclusion des réseaux d’aide ou la division sociale du travail sont des éléments connus depuis plus de 40 ans. Ils ont été identifiés par des pédagogues qui sont pourtant la cible des caricatures. Ces dérives sont donc, la plupart du temps, prises en compte par les enseignants qui pratiquent les pédagogies de la coopération.

Là où un cours traditionnel va mettre en difficulté un élève timide qui n’osera pas prendre la parole devant la classe entière, d’autres modalités proposées dans un plan de travail vont, par exemple, permettre à l’élève d’échanger dans un petit groupe.

C’est encore plus vrai pour les élèves qui seraient « trop faibles pour aider quiconque ». En se renseignant un minimum auprès des collègues qui utilisent plans de travail et feuilles de route et en lisant les différents écrits scientifiques sur le sujet plutôt que de dénigrer gratuitement des pratiques, on saurait qu’il n’y a aucune contradiction avec la bienveillance, bien au contraire. Une des conditions de l’utilisation émancipatrice de l’aide réside dans la réciprocité. Tout le monde peut aider, tout le monde peut recevoir de l’aide. Les élèves ayant le choix de l’ordre dans lequel ils peuvent réaliser certaines tâches, les élèves plus « faibles » sont donc à un moment donné susceptibles d’aider des élèves plus « forts » pour les travaux que les premiers ont déjà réalisés et terminés. C’est l’un des points essentiels de ces pratiques coopératives qui permettent justement à tous les élèves d’être en situation d’aider et d’être aidés. Des formes d’enseignement mutuel, des marchés des connaissances, la valorisation de tous types de travaux permettent quant à elles à chaque élève d’être en mesure d’apporter aux autres. C’est souvent un grand motif de satisfaction chez les élèves habituellement en échec.

Enfin, l’argument imparable des élèves qui n’aiment pas travailler en groupe est problématique même s’il correspond à une réalité. Sur l’aide en particulier dans le cadre qui a été extrait ici, nous l’avons dit, elle reste à l’initiative des élèves. C’est d’ailleurs celui qui en a besoin qui doit être à l’origine de cette situation pour éviter toute stigmatisation. Sur le travail par groupes, il ne faut pas oublier que l’apprentissage de la coopération est en effet inclus dans les programmes. On peut certes militer pour un changement des programmes mais on ne peut priver des élèves de certains apprentissages en fonction des enseignants qu’ils les ont en charge. Car coopérer cela s’apprend, progressivement. C’est à la fois une modalité de travail qui permet d’acquérir des apprentissages mais c’est aussi un apprentissage en soi. Un enseignant qui pratique la coopération pourra éventuellement autoriser un élève à préférer travailler seul qu’à plusieurs, mais, dans la mesure où cette mise en groupe est ciblée, sur un temps court, sur une activité qui gagne à être faite à plusieurs, l’intérêt de l’élève à rester seul sera limité.

Echanger, observer, se renseigner pour élargir sa palette de possibles c’est le réflexe de la majorité des enseignants. Majorité qui doit subir les sarcasmes d’une minorité de critiqueurs compulsifs.

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Pourquoi est-ce si difficile de débattre sur les questions d’éducation ?

In Salle des profs on 5 janvier 2019 at 19 h 22 min

Quelques raisons en vrac :

 

Quand le pédagogue dit …

Le réac-publicain comprend

(ou feint de comprendre) …

Élève au centre Enfant au centre
Personnalisation individualisation
Travail de groupe dans lequel les rôles, les tâches des élèves se complètent Des élèves assis en îlot pour réaliser une seule tâche
Abandon des notes Abandon des évaluations
Partage de pratiques pour éventuellement s’en inspirer Mise en avant pour imposer
Diversification des pratiques Ne croire qu’en une seule pratique miracle
L’élève construit ses apprentissages L’élève construit le cours
Donner de nouveaux droits aux élèves Supprimer des droits aux adultes
Refuser l‘élitisme Diminuer les exigences
Différencier Diminuer les exigences
Prendre en compte la difficulté scolaire Diminuer les exigences
Bienveillance Diminution des exigences
Bienveillance Absence de contraintes
Bienveillance Absence de règles
Intérêt pour la pédagogie Rejet de la didactique
Réfléchir à la forme Abandonner le fond
Innover Rejeter en bloc les méthodes anciennes
Utiliser le numérique Vendre sa classe aux GAFAM
Mise en œuvre de pédagogies actives Absence de régulation et de synthèse par le prof
Accompagner Animer
Droit à l’erreur Laisser passer des erreurs
Postulat d’éducabilité Conserver des élèves qui n’ont rien à faire là
Prendre du temps Perdre du temps

 

Les E.P.I (carte mentale)

In Salle des profs on 16 janvier 2016 at 14 h 11 min

epi

Les Enseignements Pratiques Interdisciplinaires (EPI) : Quand le terrain tord le cou aux caricatures

In Salle de classe, Salle des profs on 13 septembre 2015 at 19 h 46 min

En Juin dernier, treize professeurs du collège, tous volontaires décident d’expérimenter dès cette année les Epi dans une classe de 4e. Tous ne soutiennent pas la réforme du collège dans son intégralité mais veulent découvrir par les textes et les mises en oeuvre ce que sont effectivement ces epi.

Il est vrai que dans notre collège, on peut s’appuyer sur une tradition des projets interdisciplinaires : Les idd n’ont jamais été abandonnés, et bon nombre de projets menés par les collègues traversent les disciplines. [mise au point n°1: Cette réforme n’est pas « hors-sol » ].

Une fois tous autour de la table, on se rend compte très vite que nous sommes suffisamment nombreux pour une mise en oeuvre sur deux classes. [mise au point n°2: Aucun collègue n’est forcé de s’investir dans les EPI. Les volontaires suffisent pour encadrer ces 2/3h par classes].

Début de réunion ; chacun liste au tableau les points de programmes susceptibles d’être croisés avec une autre discipline. Les associations sont faites facilement, les thèmes repérés. [mise au point n°3 : les heures d’EPI ne sont donc pas prélevés sur les disciplines mais permettent bien de traiter une partie du programme].

Chacun des projets est alors associé facilement à une des thématiques proposées.

Les binômes affinent alors leur projet en choisissant notamment la durée de l’epi et ses modalités de mises en œuvre. Les epi d’une heure sur un trimestre ont la préférence de beaucoup, même si des projets sur l’année et par semestre sont aussi envisagés. Les modalités choisies vont être variées et vont donc nous permettre d’évaluer celles qui sont les plus pratiques : 1h/semaine – séquence de 12h – 2h/semaine pendant six semaines …[mise au point n°4 : il existe bien une grande souplesse laissée aux équipes]

Elaboration des calendriers sur l’année. C’est le point le plus délicat. On répartit les projets sur les deux classes. Une contrainte nous pose problème : les classes d’un même niveau doivent avoir le même nombre d’heures d’Epi dans leur emploi du temps, ici deux heures. On se voit donc dans l’obligation d’abandonner un projet sur un semestre. Mise à part ce problème, la répartition se fait sans autre problème. [mise au point n°5 : la mise en place des Epi n’est pas un casse tête insurmontable pour les chefs d’établissement. Il leur faudra surtout veiller à répartir les binômes dans les mêmes classes et à leur donner des heures consécutives dans l’emploi du temps si le projet l’exige. Pour le reste, faire confiance aux équipes, utiliser intelligemment les journées de fin d’année scolaire seront des aides précieuses].

La répartition sur l’année est trouvée après plusieurs simulations pour les deux classes

[mise au point n°6 : Les emplois du temps sont fixes sur l’année. Pas d’emploi du temps trimestriel pour les enseignants. Les heures utilisées sont celles inscrites dans les emplois du temps. Nul besoin d’alignement non plus. Certes l’an prochain, il y aura les heures marges à répartir. Là, on peut en effet imaginer que leur attribution change d’un trimestre à l’autre … ce qui est déjà le cas avec les hse.]

Capture

Il nous reste désormais à mettre en œuvre ces epi.

Je présenterai plus précisément leur déroulé et leur évaluation en cours d’année.

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le 27/10 -Nouvelle mise au point . Cet article ayant beaucoup circulé sur les réseaux sociaux, il a été commenté. Certains y ont émis une réserve : ça fonctionne pour deux classes, ce sera différent pour toutes. S’ils avaient lu attentivement ce témoignage, ils auraient compris que non. Nous avons fait le choix d’une organisation qui ne touche absolument pas aux emplois du temps. Multiplier le nombre de classes ne changera rien. Même chose pour le volontariat : nous avons tous plusieurs classes, rien ne nous empêche de proposer les mêmes « epi » dans toutes nos classes (cf l’exemple de celui combinant arts plastiques et éducation musicale ici)

Réforme du collège : la contre proposition qu’on n’ose pas nous proposer

In Salle des profs on 24 mai 2015 at 18 h 44 min

Dessin de Jimo

Dessin de Jimo

Nous avons cherché les contre-propositions des adversaires de la réforme du collège. Nous n’avons pas trouvé de propositions de grille-horaires.

Néanmoins en fonction des arguments avancés ces derniers temps, nous avons pu l’élaborer. Chaque discipline (ou presque) y va de sa pétition et de sa revendication. « On sacrifie les sciences », « on sacrifie les langues »… Chacun revendique un peu plus, ignorant l’approche globale que doit avoir une réforme.

Pêle-mêle :

– Plutôt que de supprimer les classes bilangues et commencer la LV2 en 5e, généralisons les classes bilangues pour tous les élèves

– Une langue ne peut être correctement apprise qu’avec un minimum de 5h par semaine

– Il faut augmenter sensiblement les heures dans les matières fondamentales (français, maths)

– Hors de question de prendre sur l’horaire d’histoire-géographie pour enseigner l’EMC

– Le latin et le grec sont indispensables pour réussir en français (et pour accéder à la « civilisation » et l’humanisme)

– Hors de question de diminuer les horaires disciplinaires

– Les travaux pluridisciplinaires doivent être progressifs et proposés en plus des heures disciplinaires

– L’AP ne sert à rien, il faut la remplacer par des heures de soutien et d’approfondissement dans les matières fondamentales

– Il ne faut pas supprimer les devoirs à la maison mais mettre en place dans les emplois du temps des heures pour les faire au collège

En tenant compte de tous ces postulats, l’emploi du temps d’un élève de collège (en 5e?) pourrait ressembler à ça :

français : 7h

maths : 7h

anglais : 5h

Lv2 : 5h

hist-geo : 3h

emc : 1h

svt : 2h

sc phys : 2h

technologie : 2h

ed musicale : 1h

arts plastiques : 1h

eps : 3h

latin : 2h

grec : 2h

travaux pluridisciplinaires : 2 h

soutien français : 2h

soutien math: 2h

aide aux devoirs : 4h

TOTAL : 53h

Qu’en pensent les parents ?

Ceux qui luttent contre la réforme recouvrent au moins toutes ces revendications qui arrivent à une proposition ridicule.

Le fait est qu’au final, il faut trancher et penser globalement. Il y a des arbitrages à faire et contenter tout le monde est illusoire. Rappelons que la réforme n’a pas pour but de contenter les enseignants mais de faire mieux réussir tous les élèves.
Nous comprenons qu’il soit plus facile de ne pas formuler de contre proposition globale puisqu’on finit par fâcher quelqu’un (et on perd alors une part de clientèle) ou alors sombrer dans le ridicule.

C’est aussi la raison pour laquelle une réforme ne fera jamais l’unanimité et peinera à convaincre une majorité.

Guillaume Caron & Laurent Fillion

 

Réforme du collège : s’opposer à quoi ?

In Salle des profs on 7 avril 2015 at 17 h 05 min

Dès sa présentation initiale, la réforme du collège a provoqué un tollé surjoué. Accusée de tous les maux avant même qu’elle n’ait eu la chance d’être précisée et encore moins mise en œuvre, elle constitue un enjeu important pour la démocratisation du collège. Construire enfin le collège unique et sortir d’une vision mini-lycée.

Nous avons la conviction que la réforme proposée aujourd’hui va dans le bon sens, qu’elle est relativement ambitieuse et qu’il faudra avoir le courage d’aller au bout de l’idée.

Cette réforme a ses détracteurs. Si nous pouvons comprendre l’inquiétude des collègues de bonne foi, inquiets par l’inconnu, il ne faut pas se voiler la face, d’autres défendent une vision passéiste de l’école. La blouse et le tableau noir, le maître qui détient et déverse son savoir… et au final des élèves laissés pour compte.

Plus inquiétant peut être, des collègues plutôt progressistes, qui s’opposent avant tout parce que certains points les inquiètent, demandent à être précisés ou ajustés… au risque de se retrouver, par la force des choses, alliés à ceux qui ont une vision opposée de l’école.

Car il ne faut pas se tromper d’enjeu, c’est bien la philosophie générale du projet qu’il faut défendre. Les points de tension relèvent désormais de la construction et non de l’opposition qui ne servira que le statu quo, voire la préparation d’un retour en arrière.

Revenons sur certains des arguments entendus pour critiquer ce projet de réforme, (on ne commentera pas par contre les grossières tentatives de manipulation pour faire peur aux collègues).

 

→ Petite réforme, peu ambitieuse ?

 

Assez curieusement, dans les premières heures qui ont suivi les annonces ministérielles, certaines voix ont dénoncé une reforme à l’eau tiède. « Tout ça pour ça ». Etant donné l’hystérie qu’elle soulève depuis, elle n’est clairement pas de cet ordre.

En effet, si elle va à son terme sans perdre ses grandes lignes, c’est pour nous une révolution au niveau du collège.

N’oublions pas que cette réforme est globale, qu’elle s’accompagne d’un nouveau socle, de nouveaux programmes par cycle… A-t-on déjà été aussi global dans l’approche ? Cette fois, ça ressemble clairement à une refondation.

Evidemment, on aurait préféré qu’elle aille plus loin, que les choix soient encore plus courageux.

Il ne faudrait pas non plus que les nécessaires ajustements après négociations détricotent trop le projet initial. Attention notamment à ne pas surcharger l’emploi du temps des élèves et/ou trop diminuer les marges de manœuvre initialement prévues en revenant trop sur les horaires disciplinaires. (S’il fallait satisfaire toutes les associations disciplinaire, l’emploi du temps des élèves atteindrait facilement les 50 heures/semaine). Ayons pour une fois une vision globale du projet éducatif du collège.

 

→ “On faisait déjà !”

Technique bien connue des conservateurs : crier qu’on faisait déjà ! C’est exactement ce qu’on a pu entendre sur le travail par compétences… Passons sur le fait qu’il soit alors curieux de s’opposer à la réforme si elle conforte des pratiques (soit-disants) existantes…

L’interdisciplinarité, on faisait déjà ? Alors très bien, la voir instituée avec un temps dédié sans devoir négocier des modifications d’emploi du temps est donc une aubaine.

Accompagner personnellement les élèves ? Le collège le faisait déjà ? L’AP n’existe officiellement qu’en classe de 6ème et il est loin d’être utilisé en tant que tel dans la totalité des collèges. Combien d’établissements redistribuent les heures à des disciplines ou constituent des groupes figés ?
Et donc en 5e, 4e, 3e ? Du soutien externalisé parfois pour les élèves en difficulté…
On parle cette fois d’un vrai temps institué pour le faire. L’AP se fera avec un effectif trop nombreux ? Peut-être, mais faut-il attendre le grand soir pour commencer à aider différemment les élèves en difficulté?

→ “La réforme du collège remet en cause les disciplines.”

Parce que croiser les disciplines pour donner du sens aux apprentissages revient à les supprimer ? Mettre en avant la complémentarité des disciplines, la faire comprendre aux élèves c’est au contraire les conforter dans leurs rôles respectifs.

 

→ “Présenter le pluri/transdisciplinaire comme la panacée, ce n’est pas sérieux !”

Avec 20 % seulement de l’emploi du temps élèves consacrés aux projets plurisdisciplinaires, il n’est pas sérieux de faire croire que cette réforme les présente comme la solution miracle. Nous avons maintes fois précisé que nous ne croyons pas à une forme de pédagogie qui réussirait avec tous les élèves mais qu’au contraire c’est par la diversité des méthodes utilisées qu’on sera à même de toucher tous les élèves. La réforme offre un cadre pour pouvoir mettre en oeuvre un peu de cette diversité.

 

→ “Le transdisciplinaire ça ne marche pas !”

Voilà  une contradiction supplémentaire si on rattache cet argument au “On le faisait déjà”. Il ne faudrait pas croire que cette contradiction soit due à l’attelage hétéroclite des opposants au projet. Non, Bizarrement on peut lire ces deux phrases antagonistes à partir des mêmes sources.

Si ça ne marche pas, pourquoi tant de collègues le faisaient déjà ? La question mérite d’être posée.

Affirmer que cela ne fonctionne pas, voire que c’est néfaste aux élèves, c’est une fois de plus une remise en cause inadmissible vis à vis des nombreux collègues qui utilisent ces pratiques, le plus souvent avec des élèves en difficultés et/ou dans des établissements dit difficiles. Une partie des propositions faites pour le collège s’appuient sur ce qui a été mis en oeuvre sur le terrain. Certains font semblant de l’oublier ou de ne pas le croire.

 

→ “C’est une remise en cause de la liberté pédagogique !”

On est là face à une vraie contradiction dans le discours des conservateurs. Ils ne cessent de réclamer un cadrage national et s’oppose à la généralisation de ce qui était des exceptions tolérées dans le cadre d’expérimentation. Bien loin d’obliger tous les profs à s’investir dans une pédagogie du projet croisant les disciplines, ces EPI vont plutôt offrir un cadre qui manquait jusque là à ceux qui souhaitent s’y investir. Les collègues qui feront le choix de s’y investir (avec 20 % de l’emploi du temps des élèves concerné, on ne fera croire à personne que tous les profs se le verront imposer) pourront désormais le faire sans les contraintes de l’article 34.

Mais la liberté pédagogique s’arrête pour certains là où commence une certaine vision de la pédagogie… C’est en effet cocasse de voir un syndicat influent vouloir défendre la liberté pédagogique alors qu’il s’était opposé à l’ouverture du collège Clisthène.

→” Les EPI ne serviront que de variables d’ajustement ?”

Pourquoi donc ne pas faire confiance aux collègues pour imposer l’aspect pédagogique de ce cadre plutôt que son aspect comptable ? Evidemment si on crie haut et fort que la pédagogie du projet et l’interdisciplinarité n’ont aucune valeur pédagogique, ça va être difficile.

Et reprocher aux collègues d’avoir parfois utilisé les idd pour éviter un service partagé, c’est un peu dur. Et souvent injuste car les dits collègues ont su alors s’approprier les idd pour en faire de vrais moments d’apprentissages (bien loin des caricatures qu’on a pu lire ici ou là).
Ajoutons que les EPI ne font pas l’objet d’une dotation “à part”, ils sont intégrés aux disciplines. Ainsi, si on décide de faire un EPI avec de l’histoire-géographie, on n’ajoute pas d’heures dans cette discipline pour compléter un service. On décide simplement de faire autrement sur une partie des heures dédiées pour diversifier les approches.

 

→ “La réforme crée de nouvelles hiérarchies intermédiaires fondées sur le caporalisme”

Dans la ligne de mire de cette critique, les conseils pédagogiques qui devraient travailler à la mise en oeuvre de la modeste autonomie accordée aux équipes. Encore une fois, cette critique montre un manque de confiance totale envers les collègues. Le conseil pédagogique c’est un conseil d’enseignants ! Etonnant ce rejet de la part d’organisation qui réclame par ailleurs l’autogestion…

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On le voit, les enjeux de cette réforme ne méritaient sans doute pas tous les excès auxquels on a eu droit de la part de ses détracteurs.

 L’emploi de termes guerriers utilisés par trois organisations syndicales dans leur mails respectifs envoyés à tous les enseignants étaient-il justifiés ?

On a pu entendre et lire de vives attaques à l’encontre des associations et organisations syndicales qui soutiennent ce projet. Pourquoi s’y opposeraient-elles alors qu’il correspond à ce qu’elles réclament depuis toujours ? Faudrait-il se renier sous prétexte que cette réforme est proposée par un gouvernement dont on peut par ailleurs combattre d’autres projets ? Conception étrange du militantisme. Conception qui a engendré bien des outrances. Ainsi les partisans de la réforme se sont vu qualifier de “jaunes” de “collaborateurs”… Les mots ont un sens que l’histoire a façonné. Il faut donc être rigoureux dans leur emploi (un peu comme quand on parle de prise d’otages lors de grèves). Nous ne nous souvenons pas de l’utilisation de tels qualificatifs quand un membre influent d’un syndicat écrivait en catimini les programmes Darcos de 2007, ni quand certaines organisations ont encensé le président de la République et le gouvernement actuels quand ils ont annoncé le maintien des notes.

Faut-il être si peu sûr de son opposition à un projet pour tomber dans de tels excès.

Guillaume Caron & Laurent Fillion

L’école n’est pas forcément la cause mais doit être la solution

In Salle des profs on 11 janvier 2015 at 12 h 55 min

Depuis jeudi, on peut lire de nombreux témoignages de collègues sur la manière dont ils ont abordé les événements tragiques de ces derniers jours avec leurs élèves.

On y trouve souvent de quoi espérer.

On y trouve aussi -hélas- des compte-rendus de moments qui ont dérapé, qui ont laissé les collègues dans le désarroi et l’impuissance : des élèves qui font tous les amalgames mais aussi et surtout dans, d’autres endroits, des élèves qui justifient l’attentat contre Charlie Hebdo, qui refusent de participer à la minute de silence.

Me reviennent alors en mémoire ce que j’ai pu lire et entendre ces derniers mois au cours de débat sur l’éducation, des propos proclamés haut et fort, défendus becs et ongles par certains, anonymes mais aussi responsables syndicaux et associatifs.

– « Il faut bannir les mot éducation nationale pour ceux d’ instruction publique »

– « Nos enseignements sont parasités par des enseignements annexes inutiles comme l’éducation aux médias, l’apprentissage du débat, les heures de vie de classe, l’éducation à la citoyenneté, bientôt l’enseignement moral et civique »

– « Apprendre le vivre ensemble : encore une mode de bisounours »

– « Enseigner des compétences sociales et civiques, c’est dangereux »

– « L’école est un sanctuaire : elle n’a pas à aborder les problèmes extérieurs »

– « Moi je suis prof d’histoire-géo : l’éducation civique j’en fais si j’ai le temps »

– …

Celles et ceux qui ont pensé et prononcé ces phrases l’ont fait de bonne foi, en se basant sur les priorités qu’ils croyaient justes. L’étaient-elles vraiment ?

Il est temps de reconnaître pour certains qu’ils se sont trompés. Non pas d’affirmer un peu rapidement que l’école est la cause unique de ce qui s’est passé mais d’accepter qu’elle peut être la solution.

A nous, éducateurs, de relever enfin ce défi en acceptant de changer (un peu) de posture.

A nous, professeurs, de donner du sens aux apprentissages pour les mettre au service d’une évolution de la société.

Rien ne dit que nous réussirons. Mais de là à ne pas essayer …

Pourquoi les notes posent vraiment problèmes.

In Salle des profs on 26 juin 2014 at 13 h 19 min

Avec le lancement de  la conférence nationale sur l’évaluation des élèves, le débat sur l’évaluation a été relancé. Et souvent plutôt mal.

Oui la notation pose problèmes ! Mais pas forcément ceux qu’on met le plus en avant. A en croire les journalistes, notre ministre et même quelques spécialistes, le principal problème posé par la note serait qu’elle suscite le découragement chez les élèves, voire qu’elle serait forcément malveillante.

illustration de Marc Chalvin tirée de Laura Jaffré "Tout ce que vous pensez des profs et ce qu'ils pensent de vous" ed. La Martinière

illustration de Marc Chalvin tirée de Laura Jaffré « Tout ce que vous pensez des profs et ce qu’ils pensent de vous » ed. La Martinière

 

C’est évidemment plus facile de ne pas décourager en utilisant d’autres modèles d’évaluation mais ce n’est pas aussi évident que les raccourcis simplistes  utilisés ici ou là le laissent croire.

D’une part, on peut très bien humilier un élève avec les points Lomer si on veut humilier. (mais on sait tous que ça n’existe pas un prof qui humilie ses élèves).

D’autre part, avant de les abandonner, nous avons utilisé les notes. Difficile d’affirmer aujourd’hui que nous n’étions pas  bienveillants. Il nous suffisait d’atténuer le ressenti que peuvent avoir les élèves devant un note trop basse (ou trop haute !), avec plus ou moins de succès.

Les vrais problèmes sont autres.

– La note induit le classement, la compétition, l’élitisme

Qu’on le veuille ou non, au final, mettre une note ou donner un moyenne permet de situer les élèves les uns par rapport aux autres, quand il convient de les situer par rapport à une situation de départ ou à un objectif d’arrivée.

Observons les élèves quand on rend les copies.   Que font-ils en premier lieu : lire les commentaires ? repérer leurs réussites ? leurs échecs ? leurs progrès ? Non « t’as eu combien toi ? et Kevin ? Yes, je l’ai battu ! »  » M’sieur c’est qui qui a la meilleure note ? »

Ecoutons les parents (ça s’applique à nous même les parents/profs) « J’ai eu un 14 aujourd’hui Maman ! »  » C’était quoi la meilleure note ? et la plus basse ? »

Observons les bulletins générés par les applications « offertes » par l’administration : moyenne la plus haute, la plus basse …

Les enseignants doivent-ils nécessairement répondre à cette demande de compétition ? Les rares collègues qui, après avoir testé une évaluation différente et qui sont revenus aux notes, le pensent puisque c’est la raison qu’ils invoquent : pouvoir classer les élèves.

Mais quel intérêt pour les apprentissages ?

La notation chiffrée est donc avant tout au service de l’élitisme. Rappelons que c’est pour cette raison qu’elles ont été inventées par les Jésuites. Aussi doit-on continuer à la pratiquer dès lors qu’on souhaite une véritable démocratisation de l’enseignement ?

– La note induit les moyennes et donc la compensation.

On lit souvent que le problème c’est la moyenne, pas les notes. Mais à partir du moment où l’on communique par notes, le réflexe est de passer aux moyennes, même quand on a aboli les moyennes générales. Certes, cela procure un excellente occasion aux élèves de réviser et appliquer leur mode de calcul. Car on sait tous que cette moyenne générale est calculée par les élèves et les familles. « 8 sur 20 en histoire-géo, pas grave grâce au 14 en maths ! »

Enfin, si on critique – à juste titre les moyennes générales- on semble être très attaché par contre aux moyennes disciplinaires. Pourtant, elles relèvent de la même logique (ou absence de logique). Comment peut-on résumer en une seule moyenne des notes de dictée, de rédaction, d’exercice de grammaire ? Là aussi, on permet la compensation (et donc des exigences au rabais)

– La note se satisfait d’exigences minimales

« Kevin : 10,5. Tu as la moyenne » Et Sconet Notes ne l’inscrira pas en rouge cette fois !

Que fait-on quand on a fini un paquet de copies ? On compte combien il y a de notes au-dessus de la moyenne !

On reproche souvent à l’évaluation par compétence d’être binaire « acquis / non acquis ». Il est vrai que « au-dessus de la moyenne / en-dessous de la moyenne » c’est très différent !

Surtout cette barre fatidique du 10 sur 20 à atteindre montre combien on se satisfait que les élèves ne maîtrisent au final que la moitié des objectifs d’apprentissage fixés.

– La note renseigne très mal les élèves et les parents

 

illustration de Marc Chalvin tirée de Laura Jaffré "Tout ce que vous pensez des profs et ce qu'ils pensent de vous" ed. La Martinière

illustration de Marc Chalvin tirée de Laura Jaffré « Tout ce que vous pensez des profs et ce qu’ils pensent de vous » ed. La Martinière

On entend souvent que la note est plus accessible aux parents. A défaut d’être simple, elle est surtout simpliste.

Il est rare qu’un devoir ne porte que sur une seule capacité. Aussi, le résumer par une note (fut-elle accompagnée de commentaires) ne permet pas à l’élève de savoir ce qu’il a réussi ou non. Kevin ne retiendra que le 12 sur 20.

Pire, la note ne permet pas de connaître les progrès ou très mal.

Prenons deux évaluations consécutives que j’ai données cette année en classe de Quatrième. La première portait sur la maîtrise du vocabulaire, la lecture de carte et la capacité à produire un récit . La seconde s’attachait à évaluer la maîtrise du vocabulaire (mais pas le même),  la lecture de textes et de graphiques et  la réalisation d’une carte. Kevin aurait obtenu 8 sur 20 au premier, 13 au second. Il en conclura qu’il a fait des progrès !

 

– La note ne permet pas au professeur de connaître finement ses élèves.

Dresser le bilan pour un élève avec pour seul outil un relevé de notes est une gageure. Que maîtrise-t-il dans ma matière ?  Quels progrès a-t-il réalisés ? Quels objectifs lui fixer ?

Comment constituer des groupes de besoin pour travailler en ateliers de progrès à partir des seules notes ? Comment constituer des groupes d’élèves complémentaires dans lesquels chacun pourra apporter aux autres pour une séance d’enseignement mutuel ou pour un groupe de production ?

 

– La note parasite les apprentissages.

Elle met l’apprentissage au service de l’évaluation quand c’est l’évaluation qui devrait être au service de l’apprentissage.

Kevin « travaille » pour avoir une bonne note, pour réussir l’évaluation. Et quand les efforts entrepris ne se traduisent pas par un bonne note, il les stoppe.

Du reste, tous les ans à la même période,  on entend les plaintes quant à la démobilisation des élèves après l' »arrêt des notes » toujours trop tôt. Comme si on ne pouvait pas apprendre sans être sanctionné par une évaluation.

La logique devrait être inverse : l’évaluation devrait permettre d’accompagner les apprentissages.

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On le voit, la note pose suffisamment de problèmes pour que ceux qui les abandonnent ne soient pas considérés comme des apprentis sorciers ( ils s’appuient sur des études réelles et bien connues) qui veulent casser le thermomètre (ils souhaitent au contraire « mesurer » plus finement).

Vouloir améliorer le système d’évaluation sans toucher aux notes, comme on l’entend parfois (il suffirait de les compléter ou de supprimer les seules moyennes) ou comme nous laisse craindre la volonté du ministre de trouver un consensus préalable (consensus qui conduit toujours à l’immobilisme dans l’Education Nationale) serait une erreur.

Enseigner la morale : et si on éduquait plutôt (enfin) à la citoyenneté ?

In Salle des profs on 23 avril 2013 at 12 h 21 min

La remise du rapport sur l’enseignement d’une morale laïque et les précisions données par le ministre n’ont ni confirmé ni infirmé les craintes et espoirs que j’avais pu émettre lors de la sortie de « Construire des compétences sociales et civiques ».

D’une manière générale, je suis assez méfiant à l’égard de ce terme de « morale ». Evitons la déclinaison d’un catéchisme républicain ou encore un enseignement moralisateur. Cela risque d’être contreproductif auprès d’adolescents toujours prompts à braver l’interdit imposé par l’adulte.

Développer une morale laïque, au-delà du vocabulaire qui peut laisser perplexe, est-ce autre chose que de permettre à chacun d’acquérir un esprit critique et de développer son jugement, tout en coopérant avec les autres, tout en sachant les écouter et prendre en compte leur point de vue.

On est alors pleinement dans la construction des compétences sociales et civiques et plus particulièrement dans la construction de la citoyenneté..

Dès lors, le développement des compétences sociales et civiques est-elle soluble dans l’enseignement d’une morale laïque?

J’aurais tendance à penser que c’est le contraire : c’est l’enseignement d’un cadre dans lequel doit s’exprimer la citoyenneté qui est soluble dans celui des compétences sociales et civiques. Apprendre aux élèves à s’engager et à débattre doit nous amener nécessairement à aborder la question des limites et des règles dans lesquelles ces compétences s’exercent. Echanger les idées, ce n’est pas affirmer que toutes les idées se valent. Apprendre à assumer des responsabilités, c’est bien apprendre à se mettre au service d’une collectivité, qui a ses règles de fonctionnement et ses principes et valeurs. Apprendre à vivre ensemble, c’est bien mettre en pratique une tolérance réelle. Développer un esprit critique, c’est bien gagner en indépendance et en liberté.

Certaines pratiques semblent plus propices que d’autres à un tel enseignement, pour parvenir à développer un « rapport à soi qui est un art de l’interrogation et de la liberté », «un effort pour raisonner, considérer que tout ne se vaut pas ».

Retenons-en trois :
• Le débat
Il permet de travailler la confrontation d’arguments, la prise en compte du point de vue de l’autre…On peut aborder les grandes questions liées à la « morale laïque ». Mais aussi , par sa forme même, il développe de vraies compétences sociales et civiques.
• Le projet
Mener ensemble un projet permet de dépasser les intérêts individuels pour construire du bien commun, développe les capacités de négocier, d’échanger avec les autres, d’avoir un but commun.
• L’enseignement mutuel
Les pratiques coopératives favorisent les échanges : synthèses collectives de recherches documentaires, exposés à plusieurs.

Je reste néanmoins persuadé que de mettre en place une véritable éducation à la citoyenneté (bien plus large qu’une instruction ou une éducation civique) sur le modèle qui a été proposé hier pour l’enseignement d’une morale fut-elle républicaine aurait été plus judicieux. Les objectifs recherchés s’y seraient retrouvés au milieu d’un ensemble plus cohérent et ambitieux.

Changer les fondations sans toucher aux murs …

In Salle des profs on 15 octobre 2012 at 8 h 52 min

La refondation de l’école passe cette semaine à une nouvelle étape : le ministre doit recevoir les organisations syndicales et les associations concernées. Un peu étonnant puisque celles-ci ont largement participé à la grande concertation  engagée depuis juillet.

Le rapport qui a été remis au Président et au ministre suite à cette concertation possède, à mes yeux, un grand nombre de propositions positives et courageuses sur de nombreux points.

Contenu du rapport de la concertation « refondons l’école » vu par Wordle

Morceaux choisis :

Sur les pratiques pédagogiques :

« la refondation sera pédagogique ou ne sera pas. »

« Or, malgré de nombreuses expériences pionnières, malgré l’investissement et l’imagination de très nombreux personnels de direction et d’enseignants, l’école est restée dans l’ensemble fidèle à une pédagogie frontale traditionnelle : un maître face à un groupe d’élèves suivant le programme au même rythme. Pourtant, les résultats de ces expériences, les exemples étrangers comme les enseignements de la recherche nous montrent que d’autres pédagogies – les petits groupes, le tutorat, les projets – sont plus efficaces, en particulier, face à la difficulté scolaire. »

Sur l’évaluation

« Pratiquer, plutôt qu’une notation-sanction, une évaluation positive simple et lisible, valorisant les progrès »

« réformer le diplôme national du brevet pour prendre en compte le socle. »

Sur l’éducation à la citoyenneté :

« L’apprentissage de la citoyenneté ne se résume pas à l’acquisition, nécessaire, de connaissances sur le système politique et institutionnel. Pour « exercer de manière lucide et raisonnée la part de souveraineté qui lui est dévolue, le citoyen doit avoir appris à s’informer sur des sujets politiques, à juger du point de vue de l’intérêt général, à avoir le souci du bien commun, de la justice et de l’égalité, à argumenter et à débattre, à assumer des responsabilités collectives. Ces compétences civiques s’acquièrent notamment par la participation aux instances représentatives et/ou à la vie associative de son établissement. »

Le discours de François Hollande, mardi, est apparu beaucoup plus « prudent » que le rapport. Il est vrai qu’entre temps, certaines organisations qui n’ont pour ambition pour l’école que l’immobilisme (tout en paradoxalement pointant ses faiblesses) avaient brandi les menaces d’une opposition farouche (donc peu constructive).

Un passage du discours m’a interpellé :

« Une grande ambition peut être gâchée, en tous cas tourmentée, par des détails qui viennent lui nuire et parfois la limiter. Il faut avoir dans ces choses à la fois de grandes idées et aussi la passion des détails. »

C’est vrai ;  les détails sont importants … c’est pourquoi je me suis demandé pourquoi le président avait évoqué un « socle commun de connaissances » en omettant les compétences.

Continuité dans l’extrême prudence jeudi avec Vincent Peillon qui a tenté de défendre l’idée d’une refondation tout en cherchant visiblement à obtenir l’unanimité des acteurs sur la future loi d’orientation.

Souci bienveillant et surtout bien compréhensif pour un politique en période trouble.

Cette prudence verbale a permis à certains de pouvoir affirmer que le ministre reculait sur bon nombre de propositions courageuses du rapport. Bel exercice de méthode Coué sans doute.

Mais les propos tenus le leur permettaient.

Un exemple sur la bivalence : « Je ne retiens pas l’idée de la bivalence (…) Je ne veux pas blesser les identités disciplinaires qui méritent le respect ». Ma foi, j’ai connu en tant qu’élève et comme prof, des PEGC qui avaient une très forte identité professionnelle que j’ai toujours respectée, voire admirée. D’ailleurs à bien y réfléchir, moi, je suis déjà tri voire quadrivalent …

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Si on se contente d’un « socle commun de propositions » pour refonder, le résultat risque de ne pas être à la hauteur des enjeux. Comment espérer concilier des acteurs qui ne  mettent pas en avant les mêmes finalités ni les mêmes valeurs ?

Si l’on veut vraiment refonder, il faudra avoir le courage de ne pas satisfaire toutes les revendications.

Sans être architecte, je ne vois pas comment on peut changer les fondations d’une grande maison sans toucher aux murs, voire sans en abattre quelques-uns…

Un article dans l’Humanité du jour regrette, à propos des reculades vis à vis des entrepreneurs,  que le gouvernement écoute davantage ceux qui le combattent plutôt que ceux qui soutiennent ses orientations. J’aimerais ne pas penser la même chose à propos de l’éducation dans quelques jours.